FRANCE-AFRIQUE OU UE-AFRIQUE ?

15 PROPOSITIONS POUR PROMOUVOIR LES RELATIONS ECONOMIQUES FRANCO-AFRICAINES

Auteurs : Lionel Zinsou (financier franco-béninois), Hubert Védrine (ex Ministre des Affaires Etrangères, Hakim el-Karoui (Economiste), Jean-Michel Severino (ex Directeur de l’Agence Française de Développement et Tidjane Thiam (Assureur Ivoirien)

  1. Poursuivre et amplifier les mesures révisant la politique française de visas économiques afin de faciliter la circulation des acteurs économiques entre la France et l’Afrique ;
  2. Relancer la formation du capital humain, la coopération universitaire et de recherche, les échanges intellectuels et les orienter vers le développement ;
  3. Soutenir le financement des infrastructures en Afrique ;
  4. Réduire le coût de mobilisation des capitaux privés et des primes de risques appliquées à l’Afrique ;
  5. Contribuer au renforcement des capacités de financement de l’économie africaine ;
  6. Augmenter les capacités d’intervention de l’Union Européenne en faveur de l’Afrique
  7. Susciter des alliances industrielles franco-africaines dans des secteurs clés pour les économies française et africaine ;
  8. Promouvoir l’économie responsable et l’engagement sociétal des entreprises ;
  9. Accompagner l’intégration régionale de l’Afrique ;
  10. Renforcer l’influence de la France en Afrique ;
  11. Réinvestir au plus vite la présence économique extérieure française en Afrique ;
  12. Intensifier le dialogue économique entre l’Afrique et la France ;
  13. Favoriser l’investissement des entreprises françaises en Afrique ;
  14. Faire de la France un espace d’accueil favorable aux investissements financiers, industriels, commerciaux et culturels africains ;
  15. Créer une fondation publique-privée franco-africaine qui sera le catalyseur du renouveau de la relation économique entre la France et l’Afrique.

10 PRIORITES ET 70 MESURES PRECONISEES PAR LE SENAT N°104 (29 octobre 2013)

Première priorité : Tenir un autre discours sur l’Afrique et définir une stratégie ambitieuse et cohérente

  1. Définir la relation de la France aux pays africains d'abord en fonction des intérêts partagés : des millions de Français qui sont d'origine africaine, ou vivent ou ont vécu en Afrique, des intérêts économiques et stratégiques, un enjeu pour la sécurité de la France comme de l’Afrique.
  2. Se départir des préventions postcoloniales et assumer le fait que l’Afrique n’est pas seulement partie prenante de notre histoire, mais aussi un élément clé de notre avenir.
  3. Établir une stratégie africaine de la France sous la forme d’un Livre blanc sur l’Afrique en associant des membres représentant le Parlement, les administrations, les opérateurs, les ONG intervenant en Afrique et des personnalités qualifiées françaises, étrangères et notamment africaines.
  4. Créer un programme de soutien « pour une écriture franco‐africaine d’une histoire partagée » afin de promouvoir le travail d’équipes mixtes franco-africaines sur l’étude de notre histoire commune.
  5. Poursuivre l’ouverture des archives sur la période coloniale.

Deuxième priorité : Améliorer le pilotage de la politique africaine et la cohérence des actions menées sur le terrain.

  1. Créer un ministère de la coopération internationale et du développement de plein exercice rassemblant les services concernés du ministère des affaires étrangères et du ministère des finances.
  2. Instaurer une structuration régionale du dispositif diplomatique avec la nomination d’ambassades chefs de file régionaux et la mise à jour régulière de «stratégies‐régions» validées au niveau interministériel.
  3. Etudier la possibilité dans certains pays de mutualiser le dispositif diplomatique avec certains partenaires européens afin de constituer des ambassades communes.
  4. Mettre en place une cellule de haut niveau en charge de la gestion civilo‐militaire des situations de crise afin d’assurer une véritable coordination entre les responsables du développement et de la sécurité là où la France est présente. Cette cellule aura pour fonction de coordonner les actions de prévention des crises ou de gestion des situations post‐crises afin de favoriser le rétablissement des services publics et privés essentiels au fonctionnement normal d’un pays.

Troisième priorité : Renforcer nos liens économiques avec l’Afrique qui décolle.

  1. Structurer une démarche internationale par géographies et par secteurs qui correspondent aux besoins des marchés africains, renforcer les moyens de soutien aux entreprises dans les pays les plus dynamiques tels que l’Afrique du Sud, le Nigéria, la Côte d’Ivoire, et le Kenya, mais également l’Éthiopie, le Ghana, le Botswana, la Tanzanie ou le Mozambique.
  2. Développer la pratique du portage des PME par les grands groupes présents sur le continent dans une démarche adaptée aux réalités africaines.
  3. Développer des stratégies de conquête des marchés africains par le bas de la Pyramide et créer avec Proparco un fonds d’investissement en partenariat public privé sur ce type de stratégie « le bas de la Pyramides » impliquant des nouvelles technologies et des entreprises françaises.
  4. Mettre fin à l’hémorragie des services économiques en Afrique, établir des stratégies régionales avec l’ensemble des services intervenant dans le domaine économique, renforcer les synergies entre Ubifrance, les Missions économiques, les Chambres de Commerce et d'Industries (CCI), en France et à l'étranger (Uccife), les conseillers du Commerce extérieur de la France (CCEF), Oséo, Coface, Pacte PME International, et les Opérateurs spécialisés du commerce international (OSCI). Soutenir les postes dépourvus de service économique ou de soutien commercial.
  5. Inscrire dans le COM de l’AFD un mandat dans le cadre de sa mission au service du développement de dialogue avec les entreprises privées et les bureaux d’études français et de promotion de l’économie française autour de l’expertise.
  6. Fixer à PROPARCO des objectifs de co‐investissement avec des entreprises françaises et soutenir son développement en renforçant ses fonds propres et lui garantissant une plus grande autonomie organique par rapport à l’AFD.
  7. Plaider au sein de l’OCDE et du G20 pour une clause de réciprocité sur l’ouverture des marchés financés par l’APD afin de pousser les pays émergents à délier leurs financements ou, le cas échéant, à exclure leurs entreprises des appels d’offres financés par l’APD.
  8. Renforcer les exigences environnementales et sociales dans les dossiers d’appel d’offres pour les marchés financés par la coopération française afin de permettre aux bénéficiaires de ces financements d’éliminer, au stade de la pré‐qualification et de l’évaluation des offres, des entreprises ou des propositions qui ne seraient pas conformes techniquement sur le volet responsabilité sociale et environnementale et de sanctionner une entreprise qui ne respecterait pas ses engagements lors de l’exécution de son marché.
  9. Faire établir par le Comité pour les métaux stratégiques (COMES) et le SGDSN une étude des intérêts de la France en Afrique en matière d’approvisionnement stratégique et prendre en compte les conclusions de cette étude dans la définition de la stratégie africaine.
  10. Engager le processus formel d’adhésion à l’initiative sur la transparence dans les industries extractives (ITIE).
  11. Engager la transposition par la France des dispositions des directives comptables concernant certaines obligations pour les entreprises extractives européennes de publier pays par pays et projet par projet les revenus tirés de l’exploitation des ressources extractives versés à des Etats et définir une stratégie d’exemplarité des entreprises publiques françaises intervenant dans ce domaine en Afrique.
  12. Soutenir les initiatives et les programmes des banques multilatérales de développement dans le domaine des industries extractives.
  13. Renforcer la coopération en faveur du renforcement de capacité au profit des programmes de l’UEMOA et notamment du Programme Économique Régional (PER).
  14. Veiller à ce que la conclusion des Accords de partenariat économique (APE) ne nuise pas à l’intégration régionale, inviter la Commission européenne à faire preuve de plus de souplesse dans les négociations d'accords de partenariat économique régionaux afin de déboucher sur un aboutissement positif et un renforcement de la coopération européenne en faveur de l’intégration.

Quatrième priorité : Contribuer à la stabilité et la sécurité du continent.

  1.  Maintenir huit points d’appui militaire en Afrique : Abidjan, Dakar, la zone (Mali, Niger, Burkina‐Faso), Libreville, Ndjamena, Bangui, Djibouti, et l’île de la Réunion.
  2. Dédier quatre points d’appui militaire à la coopération avec les 4 organisations régionales, à Libreville avec la brigade centre de la CEEAC, Dakar avec la brigade de l’ouest de la CEDEAO, la Réunion avec la brigade sud de la SADC et Djibouti avec l’IGAD, afin d’afficher clairement la volonté française de participer à l’architecture de sécurité africaine.
  3. Ouvrir les pôles de coopération français à des participations de partenaires européens et internationaux à l’instar de ce qui a été fait pour les écoles nationales à vocation régionale (ENVR).
  4. Dépasser la distinction entre OPEX et forces prépositionnées au profit d’un dispositif global où les effectifs de chaque base évoluent en fonction des besoins avec un repositionnement autour du Sahel et dans les pays accueillant une forte présence de ressortissants français.
  5.  Doter chaque point d’appui de moyens de coopération structurelle et opérationnelle aussi bien en bilatéral qu’au niveau régional ainsi que la possibilité d’une projection en cas de crise.
  6. Renforcer les crédits de la direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) et développer les ENVR avec des financements croisés de l’ensemble des ministères concernés et un recours croissant aux financements européens, multilatéraux, voire à des partenariats avec des pays qui partagent notre vision de l’Afrique, comme le Canada, ainsi qu’à des financements des pays africains qui en ont les moyens.
  7.  Renforcer les moyens de suivi et de coopération avec l’Union africaine en redéployant des effectifs vers l’ambassade d’Addis Abeba et en consacrant de l’assistance technique ou des projets bien ciblés de renforcement de capacité.

Cinquième priorité : Promouvoir le pluralisme politique.

  1. Intégrer dans les discours français sur l’avenir de l’Afrique un discours renouvelé sur la notion de pluralisme et de contre‐pouvoirs.
  2. Aider à la constitution de fondations en faveur de la vigilance citoyenne, des contre‐pouvoirs, des médias, des parlements, et de la « société civile ».
  3. Renforcer le dialogue avec les sociétés civiles et poursuivre l’engagement de doublement du montant de l’aide qui transite par les ONG.
  4. Soutenir les actions de coopération décentralisée en faveur de l’Afrique et étendre le dispositif de la loi Oudin‐Santini aux ordures ménagères pour financer des actions de coopération dans ce domaine dans une Afrique en urbanisation rapide.

Sixième priorité : Moderniser la coopération au développement.

  1. Confier à un ministère de la coopération internationale et du développement la responsabilité des programmes 110 et 209 et les services qui les gèrent.
  2. Simplifier l’organisation du réseau en mettant fin à la double compétence des Services de coopération et d’action culturelle (SCAC) et des agences de l’AFD et réduire ainsi son coût en s’appuyant principalement sur les agences de l’AFD sous l’autorité des ambassadeurs.
  3. Poursuivre les transferts de compétence opérationnelle au profit de l’AFD de façon à ce que les Fonds de solidarité prioritaire (FSP) (hors domaine strictement régalien (police et justice)) soient gérés par l’AFD.
  4. Mutualiser des fonctions support entre les représentations des instituts de recherche pour le développement dans un même pays des opérateurs du développement.
  5. Resserrer le réseau des opérateurs de recherche pour le développement autour de représentants régionaux, responsables d’une agence.
  6. Mieux intégrer les besoins opérationnels dans la programmation des organismes de recherche pour le développement.
  7. Redresser l’équilibre des contributions bilatérales et multilatérales de façon à retrouver un niveau d’intervention sous forme de subventions supérieures à 500 millions à la fin du triennum budgétaire.
  8. Accroître la part de la taxe sur les transactions financières (TTF) française affectée à la coopération.
  9. Achever le processus d’adoption de la taxe sur les transactions financières européenne et s’assurer qu’une partie sera consacrée à la solidarité internationale.
  10. Poursuivre le travail de conviction pour l’adoption d’une taxe sur les transactions financières au niveau mondial.
  11. Consacrer le rééquilibrage de l’aide bilatérale en partie à de l’aide projet sous forme de dons destinés aux pays pauvres prioritaires et en partie aux financements d’expertises en amont des projets.
  12. Procéder à un renforcement comptable des fonds propres de l’AFD.
  13. Intégrer un nouvel accord sur une diminution de la distribution des dividendes dans le prochain contrat d’objectifs et de moyens.
  14. Supprimer la détermination en valeur absolue des effectifs de l’AFD.

Septième priorité : Promouvoir l’expertise technique française.

  1. Créer un fonds dédié à l’expertise internationale géré par l’AFD et destiné à des opérateurs privés ou publics français qui rassemblent l’ensemble des financements dédiés à l’expertise à l’international, mieux articuler les instruments d’aide liée et définir une stratégie géographique et sectorielle pour les assistants techniques.
  2. Regrouper dans un groupement d’intérêt public tous les opérateurs d’expertise technique publics.
  3. Etablir un bilan des modes d’intervention dans les pays fragiles à faible maîtrise d’ouvrage et de définir une méthodologie adaptée.
  4. Relancer les dispositifs de capital investissement dans les PME en redynamisant le Fonds d’investissement et de soutien aux entreprises en Afrique (FISEA).
  5. Créer une alliance avec les pays africains en vue des prochaines négociations sur le climat.
  6. Développer des coopérations triangulaires en collaboration avec des partenaires sans passé colonial (Canada, Australie…), avec les émergents démocratiques (Afrique du Sud, Brésil, Inde), comme avec la Chine.

Huitième priorité : Renforcement de l’action en faveur de la francophonie.

  1. Renforcer la participation au Partenariat Mondial pour l’Education.
  2. Promouvoir des partenariats public‐privé en faveur du développement de système de formation professionnelle en Afrique.
  3. Créer une université francophone pilote à l’image de l’université Paris‐Sorbonne‐Abou Dhabi.
  4. Encourager le développement de thèses en cotutelle franco‐africaine.
  5. Développer des universités numériques en coordination avec les partenaires francophones.

Neuvième priorité : Rétablir une cohérence entre la politique d’influence et la politique migratoire

  1. Modifier le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) visait à favoriser les conditions d'exercice des premières années d'expérience professionnelle –expérience qualifiante– pour les étrangers tout juste diplômés d'un établissement d'enseignement supérieur français.
  2.  Instaurer des visas pluriannuels, calqués sur la durée des études.
  3.  Élaborer dans chaque ambassade un plan d’accueil des demandeurs de visas.
  4.  Redynamiser la politique d’accueil de personnalités d’avenir
  5.  Développer le dispositif « Quai d’Orsay/Entreprises »
  6.  Entreprendre une gestion dynamique du réseau des anciens élèves des Lycées français à l’étranger et des anciens boursiers etc.
  7.  Relancer le dialogue avec les pays d’origine sur les questions migratoires, avec la constitution de groupes de suivi paritaires et définir des positions et des politiques cohérentes au niveau européen.
  8. Redéfinir une stratégie de promotion du développement solidaire.

Dixième priorité : Définir une stratégie africaine de la France dans les instances multilatérales et européennes.

  1.  Définir une stratégie africaine de la France dans les instances européennes.
  2.  Définir une stratégie française en faveur de l’Afrique dans les instances multilatérales.
  3.  Promouvoir la voix de l’Afrique dans la gouvernance mondiale.

Commentaire AALEP

COMMENTAIRE AALEP

La promotion des relations avec le Continent Africain ne peut s’instaurer que dans un cadre UE-Afrique et principalement dans les domaines suivants :

  • Partenariat pour la paix et la sécurité;
  • Partenariat pour la gouvernance démocratique et les droits de l’homme;
  • Partenariat pour le commerce, l’intégration régionale;
  • Partenariat pour la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement;
  • Partenariat sur l’énergie;
  • Partenariat sur le changement climatique;
  • Partenariat sur les migrations, la mobilité et l’emploi;
  • Partenariat pour la science, la société de l’information et l’espace.

Mentions de l'UE dans les propositions françaises 

  1. Augmenter les capacités d’intervention de l’Union Européenne en faveur de l’Afrique
  2. Etudier la possibilité dans certains pays de mutualiser le dispositif diplomatique avec certains partenaires européens afin de constituer des ambassades communes.
  3. Engager la transposition par la France des dispositions des directives comptables concernant certaines obligations pour les entreprises extractives européennes de publier pays par pays et projet par projet les revenus tirés de l’exploitation des ressources extractives versés à des Etats et définir une stratégie d’exemplarité des entreprises publiques françaises intervenant dans ce domaine en Afrique.
  4. Veiller à ce que la conclusion des Accords de partenariat économique (APE) ne nuise pas à l’intégration régionale, inviter la Commission européenne à faire preuve de plus de souplesse dans les négociations d'accords de partenariat économique régionaux afin de déboucher sur un aboutissement positif et un renforcement de la coopération européenne en faveur de l’intégration.
  5. Ouvrir les pôles de coopération français à des participations de partenaires européens et internationaux à l’instar de ce qui a été fait pour les écoles nationales à vocation régionale (ENVR).
  6. Recours croissant aux financements européens, multilatéraux, voire à des partenariats avec des pays qui partagent notre vision de l’Afrique, comme le Canada, ainsi qu’à des financements des pays africains qui en ont les moyens.
  7. Achever le processus d’adoption de la taxe sur les transactions financières européenne et s’assurer qu’une partie sera consacrée à la solidarité internationale.
  8. Relancer le dialogue avec les pays d’origine sur les questions migratoires, avec la constitution de groupes de suivi paritaires et définir des positions et des politiques cohérentes au niveau européen.
  9. Redéfinir une stratégie de promotion du développement solidaire.
  10. Définir une stratégie africaine de la France dans les instances européennes.
  11. Promouvoir la voix de l’Afrique dans la gouvernance mondiale.

 

 

 

 

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