LOBBYING IN FRANCE: MORE TRANSPARENCY WITH PUBLIC AUTHORITIES
La représentation d’intérêts (ou lobbying) auprès des responsables publics n’a donné lieu en France qu’à des mesures éparses, assez récentes . A partir de 2009, l’Assemblée nationale et le Sénat ont chacun mis en place des dispositifs spécifiques (inscription des représentants d’intérêts sur une liste et obligation pour ceux-ci de respecter certaines règles déontologiques). Depuis mai 2016, les fabricants, les importateurs et les distributeurs de produits du tabac ainsi que les entreprises, les organisations professionnelles ou les associations les représentant doivent adresser au ministre de la santé un rapport annuel détaillant leurs dépenses liées à des activités d'influence ou de représentation d'intérêts.
La loi Sapin 2 va plus loin en organisant un dispositif de portée générale, intégré dans la loi 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. Sa mise en œuvre incombera à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), créée par la loi de 2013, sauf en ce qui concerne le lobbying auprès des parlementaires.
L'essentiel des nouvelles dispositions entrera en vigueur dans les six mois de la publication de décrets d’application et, au plus tard, le 1er juillet 2017.
Le nouveau dispositif concernera les personnes morales de droit, les établissements publics ou groupements publics exerçant une activité industrielle et commerciale, les chambres de commerce et de l’industrie et les chambres de métiers et de l’artisanat, dont un dirigeant, un employé ou un membre a pour activité principale or régulière d’influer sur la décision publique, par exemple sur le contenu d’une loi ou d’un acte réglementaire en entrant en communication avec certains responsables publics, notamment : membre du Gouvernement ou d’un cabinet ministériel, député, sénateur, groupe parlementaire, collaborateur du Président de la République, certains membres d’une autorité administrative indépendante ou encore président de conseil régional ou un conseiller régional. Seront aussi visées les personnes physiques qui, sans être employées par l’une de ces personnes morales, exerceront à titre individuel cette activité.
Même si elles répondent à cette définition, certaines personnes seront néanmoins exclues du dispositif car le mandat ou la mission qu’elles ont reçu inclut la représentation d’intérêts : par exemple, les élus, les partis politiques et, en tant qu’acteurs du dialogue social, les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs. Mais l’exclusion sera limitée à la représentation effectuée dans le cadre de leur mandat ou de leur mission.
Les représentants d’intérêts définis ci-dessus devront s’inscrire sur un répertoire numérique tenu par la HATVP. Ce répertoire, commun à cette autorité, à l’Assemblée nationale et au Sénat, sera public ; son utilisation et son exploitation s’effectueront dans les conditions prévues par le Code des relations entre le public et l’administration.
Pour chaque représentant d’intérêts, ce registre indiquera son identité (pour une personne morale, celle de ses dirigeants et des personnes physiques chargées de représentation d’intérêts), le champ de ses activités de représentation d’intérêts, les actions menées auprès des responsables publics, en précisant le montant des dépenses liées à ces actions durant l’année précédente, le nombre de personnes employées dans le cadre de la représentation d’intérêts et les organisations professionnelles ou syndicales ou les associations en lien avec les intérêts représentés auxquelles il appartient. Un décret précisera notamment le rythme et les modalités de cette communication ainsi que les conditions de publication des informations données.
Tout représentant d’intérêts devra communiquer ces informations à la HATVP via un téléservice sous peine - au plus tard à compter du 1er janvier 2018 - d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
La loi Sapin 2 laisse à l’Assemblée nationale et au Sénat, plus exactement à leur bureau respectif, le soin de fixer les règles applicables aux représentants d’intérêts exerçant auprès de leurs membres.
L’organe chargé, au sein de chaque assemblée, de la déontologie parlementaire devra s’assurer du respect de ces règles et le président de l’assemblée concernée aura le pouvoir de mettre en demeure les contrevenants.
Le Conseil constitutionnel a borné les pouvoirs de la HATVP en ce domaine : sauf à méconnaître le principe de séparation des pouvoirs, le nouveau dispositif ne saurait interdire aux assemblées parlementaires de déterminer, au sein des représentants d'intérêts, des règles spécifiques à certaines catégories d'entre eux ou de prendre des mesures individuelles à leur égard ; chaque assemblée parlementaire a la possibilité d’édicter des règles applicables à des personnes qui, sans répondre à la définition du représentant d’intérêts, entrent en communication avec les membres de cette assemblée, leurs collaborateurs ou ses agents.
Les sanctions pénales, initialement prévues en cas de manquements répétitifs à la déontologie, ont été supprimées par le Conseil constitutionnel car elles réprimaient, en violation du principe de la légalité des délits et des peines, la méconnaissance d'obligations dont le contenu n'était pas défini par la loi mais par le bureau de chaque assemblée parlementaire.
A l’égard des autorités gouvernementales et administratives et des collectivités locales, la loi Sapin 2 impose le respect des règles, qui pourront être précisées dans un code de déontologie spécifique pris par décret. Les représentants d’intérêts seront tenus d’exercer leur activité avec probité et intégrité et, à ce titre, ils devront notamment
- déclarer les intérêts ou les entités qu’ils représentent dans leurs relations avec les responsables publics;
- s’abstenir de proposer ou de remettre à ces responsables des présents, dons ou avantages quelconques d’une valeur significative;
- de les inciter à enfreindre leurs propres règles déontologiques;
- de tenter d’obtenir des informations ou des décisions par des moyens frauduleux ;
- s’abstenir d’utiliser, à des fins commerciales ou publicitaires, les informations obtenues auprès de ces personnes;
- de vendre à des tiers des copies de documents provenant du Gouvernement, d’une autorité administrative ou publique indépendante;
- d’utiliser du papier à en-tête ainsi que le logo de ces autorités publiques et de ces organes administratifs.
Le représentant d’intérêts encourra un an de prison et 15 000 € d’amende si, ayant été mis en demeure de respecter ses obligations déontologiques auprès de responsables publics (autres que des parlementaires), il manque à nouveau à la même obligation dans les trois années suivantes .
Cette disposition entrera en vigueur un an après la publication des décrets qui doivent préciser le dispositif et au plus tard le 1er janvier 2018.
Add new comment