LA SOUVERAINETE EUROPEENNE SELON MACRON
Conscient de la crise existentielle qui traverse l’Europe, le président Macron avance l’idée d’une « souveraineté européenne », une notion juridiquement incongrue, mais politiquement significative, en ce sens où elle met en cause l’État-nation comme échelon pertinent de l’action politique dans un monde globalisé.
La vague d’euroscepticisme qui traverse les scènes politiques nationales se nourrit du sentiment d’impuissance/inutilité de l’Union européenne. Le doute sur la « volonté de construire ensemble » et le réflexe du repli sur soi se sont profondément ancrés. Entre le retrait britannique ou Brexit, la montée des forces populistes anti-européennes et la tentation nationaliste ou sécessionniste de certains, l’Histoire semble contester la raison d’être de la construction européenne.
Pis, l’intégration, la fédéralisation et la supranationalité ont été rayées de l’agenda politique des leaders et peuples européens. La frontière, la nation et la souveraineté, tels sont les éléments constitutifs du triptyque européen. Un juste retour au vieux paradigme apparemment en crise : l’État-nation souverain.
La question qui se pose est de savoir si les États sont à même d’assumer leur rôle historique de conduire les nations sur le chemin qu’elles souhaitent emprunter en leur assurant leur liberté extérieure. L’incapacité de l’État à juguler les maux les plus graves affectant la société entame la confiance des citoyens à son endroit. Le malaise existentiel contemporain est nourri par le sentiment d’impuissance de la puissance étatique et par l’impression d’assister à la fin de l’ère de l’État national souverain et protecteur.
La stratégie européenne du président Macron est fondée sur l’idée de « souveraineté européenne : la souveraineté véritable doit se construire dans et par l’Europe et consister précisément à conjuguer nos forces pour bâtir ensemble une puissance européenne. Il ne s’agit nullement de reconnaître la qualité de souverain – et donc d’État – à l’Union européenne (un statut qui remettrait en cause la souveraineté des États membres eux-mêmes), mais de mieux combiner les souverainetés/puissances nationales pour assurer une indépendance et une protection communes.
La question se pose de confier les missions régaliennes traditionnellement reconnues aux États-nations à une « Europe puissance. » Pour Macron, « l’Europe seule peut nous donner une capacité d’action dans le monde, face aux grands défis contemporains. L’Europe seule peut, en un mot, assurer une souveraineté réelle, c’est-à-dire notre capacité à exister dans le monde actuel pour y défendre nos valeurs et nos intérêts », l’idée est claire : affirmer la puissance de l’Europe pour renforcer la puissance de l’État et mieux protéger ainsi les nations.
L’appartenance à l’Union européenne ne commande pas la fin de l’État-nation ou l’entrée dans l’ère de « l’État post-souverain. » Repenser l’Union, c’est repenser les États de/dans l’Union. La quête de sens politique de l’intégration européenne concerne d’abord les États, dont les fondements – postulat de souveraineté et « contrat social » – sont mis à l’épreuve. D’ailleurs la « mondialisation » englobe-t-elle non seulement le sens profond de l’unification de l’Europe, mais aussi le rôle des États-nations et leurs rapports avec l’Union européenne.
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