EC VETO CONTRE LA FUSION ALSTOM ET SIEMENS

La Commission européenne a rejeté le projet de rapprochement entre  Alstom et Siemens censé créer avec le soutien des gouvernements français et allemand un champion européen du ferroviaire face à la concurrence internationale, notamment chinoise.

Le patron de Siemens a dénoncé le veto européen à la fusion dans le rail avec le français Alstom, appelant à une refonte "structurelle urgente" de la politique industrielle européenne face aux concurrents notamment chinois. "Protéger les intérêts des clients localement ne signifie pas se priver d'être sur un pied d'égalité avec des pays leaders comme la Chine et les Etats-Unis".

Cette décision de rejet, avait été critiquée par avance par le gouvernement français, le patronat européen et le PDG d'Alstom, Henri Poupart-Lafarge, qui reprochent à la Commission de limiter son analyse au seul marché intérieur européen sans tenir compte de l'évolution de l'environnement mondial, marqué notamment par l'émergence de géants chinois comme CRRC dans le ferroviaire.

Pour le ministre français des Finances, Bruno le Maire, "le rôle de la Commission européenne, des institutions européennes, c'est de défendre les intérêts économiques et industriels européens". "La décision de la Commission européenne va servir les intérêts économiques et industriels de la Chine". Elle "empêche Alstom et Siemens, les deux champions de la signalisation et du ferroviaire, de fusionner pour avoir le même poids que le grand champion industriel chinois"  M. Le Maire a d'ailleurs annoncé son intention de présenter avec le ministre allemand de l'Economie Peter Altmaier des propositions pour "refonder les règles de la concurrence européenne".

Le rejet par Bruxelles du projet de fusion entre Alstom et Siemens est une décision "complètement à côté de la plaque", a également estimé après l'annonce du rejet la secrétaire d'Etat à l'Economie Agnès Pannier-Runacher, qui juge nécessaire de faire évoluer les règles concurrentielles en Europe. "Ne pas construire une analyse de la concurrence en prenant en compte ce qui se passe sur le plan mondial (...) c'est de mon point de vue appliquer des règles du XXe siècle à une économie du XXIe siècle."

Une décision qui "va à l'encontre des intérêts européens"

Les deux capitales, comme les industriels, craignent la concurrence du chinois CRRC, numéro un mondial du ferroviaire né du rapprochement de deux entreprises d'Etat contrôlées par Pékin. CRRC fabrique 200 trains à grande vitesse chaque année, et Siemens-Alstom 35.

Selon  une source gouvernementale française le veto attendu de Bruxelles est  "symptomatique d'une certaine idéologie de la Commission qui va à l'encontre des intérêts européens", regrettant une interprétation des règles "extrêmement stricte" de la part de Bruxelles. Selon cette source, ce refus constitue "un cadeau à la Chine" qui voit s'ouvrir le marché européen, alors qu'elle se protège avec des subventions élevées et que son marché est "aujourd'hui extrêmement fermé". 

Note 

Les prix pratiqués par la CRRC défient toute concurrence. Selon le Comité National des Conseillers du Commerce Extérieur de la France (CNCCEF), la CRRC dispose en effet « d’un avantage de coût estimé  30% sur le segment ‘express’ (250 km/h) et à 43% sur le segment GV (300 km/h et plus) ». Par ailleurs, soutenue non seulement par plusieurs banques chinoises mais aussi par l’Etat, la CRRC offre l’avantage d’accepter des garanties d’exécution atteignant le tiers du montant des projets. Cela signifie qu’en cas de manquement de la CRRC à ses engagements contractuels, celle-ci bénéficie du soutien financier des banques et de l’Etat chinois. Enfin, si les concurrents européens de la CRRC ont longtemps bénéficié d’un avantage compte tenu de la qualité supérieure de leurs marchandises, cette époque est désormais révolue. La société chinoise a en effet démontré sa capacité à répondre aux normes de l’UE . En outre, la CRRC est aujourd’hui présente sur tous les segments du matériel roulant : de l’équipement des chemins de fer à l’infrastructure urbaine en passant par la très grande vitesse.

En proposant des prix compétitifs, une garantie financière en cas de manquement, et un portefeuille de produits diversifiés et de qualité, la CRRC risque bien de récupérer de grosses parts de marché de chez ses concurrents européens. Seuls le fort taux d’endettement de la société chinoise et ses pertes financières importantes semblent encore pouvoir la ralentir dans sa course au marché ferroviaire Européen.

 

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